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Le Club des Insurgés
21 janvier 2017

Sexisme à la fac: quand Lille 2 brûle Lille 2

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De qui se moque t’on ? Quand on est soi-même ancien étudiant de l’université Lille 2, on visualise très bien la situation. Un professeur à l’ancienne se retrouve confronté à une énième péripétie technique, en lien direct avec le manque de moyens latent de la faculté. Il lâche une grivoiserie de mauvais goût. Un amphithéâtre de premières années pudibonds qui se prennent déjà pour de futurs Vergès est heurté. Ils invoquent alors des conventions internationales de protection des Droits de l’Homme dont ils ne connaissent pas un traitre mot. Puis, un étudiant du syndicat UNEF qui n’a pas participé au cours, qui végète dans son local en rêvant d’un avenir politique auquel il n’accèdera jamais, saisit la rumeur au vol et la balle au bond: une lutte à mener ! On connaît tous ça. Sauf que la différence entre l’époque qu’on a connu et celle d’aujourd’hui est que le bruit de couloir qui s’évanouissait en quelques semaines se transforme désormais en un scandale surjoué sur les réseaux sociaux.

L’UNEF (et toute la gauche en fait) devrait arrêter de s’en prendre aux caméras de surveillance. Sur les réseaux, l’oeil qui voit tout a encore frappé et les universitaires soixante-huitards se retrouvent pris au piège du panoptique de Foucault qu’ils s’étaient appliqués à enseigner à leurs jeunes pousses. Il y a des lois qui protègent l’indépendance des professeurs d’université mais, dans notre société anti-démocratique, tout le monde se fout de la loi, ce qui compte c’est la morale : le politiquement correct. 

Mais revenons au sujet. Le milieu estudiantin lillois (et plus largement nordiste) avait toujours, jusqu’aux années quatre-vingt dix, su préserver son folklore, ses fêtes, son style, ses traditions. Médecine, Pharmacie, Droit, etc… l’anti-chambre des corporatismes locaux s’appelait l’université. Dans les soirées des corpos et des générales étudiantes parfois centenaires se formaient les réseaux professionnels du lendemain, les débats d’avant-garde sur la profession et, bien-évidemment, les futurs ténors du cru. Mais ces atmosphères fécondes, souvent nocturnes, étaient aussi baignées dans la vinasse et les chants paillards. Fraternité ne nait point dans la gène.

Alors mettons les choses au clair de suite. Les propos tenus dans cet amphithéâtre sont grossiers et ne méritent pas la publicité dont ils font l’objet. Sans même avoir besoin de les confronter à cette épineuse matière qu’est le droit des femmes, ils sont avant toute chose une infraction évidente à l’élégance attendue de la part d’un homme qui s’adresse à de jeunes étudiantes. Mais croire en la liberté, c’est avant tout croire en la responsabilité et il est évident que les étudiants qui ont entendus ces bêtises sont assez grands pour comprendre qu’il ne faut pas les prendre au sérieux, encore moins les singer. Ceci justifierait que cet évènement ne fasse pas l’objet d’une couteuse procédure disciplinaire (coûteuse en temps et en réputation). Car oui, si vous l’ignoriez, le président de l’université, Xavier Vandendriesche, éminent juriste de son état, s’est rué dans les brancards pour dénoncer ce scandal qu’il compte réprimer. C’est pour moi ici que se situe le véritable scandal.

Car Vandendriesche brûle ce qu’il a aimé et aime ce qu’il a brûlé. La faculté de Droit qui a bâti le ponte des finances publiques qu’il est devenu ne ressemblait en rien à un éden du politiquement correct. Loin de là. « VDD » est l’incarnation jusqu’à la caricature de cette génération de pré-retraités, encore témoins d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître et qui accouchât d’excellents juristes, certes, mais plus ou moins raffinés. Le style presque poétique d’un M.Taisne et les blagues salaces « d’ouverture » d’une Mme Lombard forment pour moi un tout indissociable caractéristique d’une notion honnie de notre époque: l’identité. La nouvelle génération de profs aseptisés et lisses, qui ne boivent pas une goute d’alcool et évitent soigneusement toute communication avec les associations étudiantes, est désormais tendance. Formés au biberon parisien et ne jurant religieusement que par une loi du marché à laquelle ils n’ont jamais été contraints, ces curés d’un droit libéral et puritain ont encore le culot de s’étonner que les étudiants d’une faculté qu’ils ont transformée en un satellite parisien s’exilent par centaines vers l’EFB et les masters d’Assas.  

Et puis, soyons francs. Féministes et libertaires, les jeunes unéfiens qui se prennent pour des combattants de la liberté ne font que répéter les lâches errements de la gauche moderne. On n’abat pas seulement un professeur, se disent-il, on abat la société patriarcale et l’autorité établie. Bien sûr. En pliant à leurs injonctions, le président de Lille 2 se rend complice. L’UFR Santé regorge de témoignages de jeunes filles qui n’ont pas du tout apprécié les débordements sexuels des beuveries soit-disant respectueuses du folklore étudiant d’en-temps (folklore détourné depuis longtemps pour justifier une culture du n’importe quoi). Le débat sur le voile à l’université a été soigneusement évité sur le site de Moulins où il progresse sans que l’on arrive à déterminer les enjeux attenant à la liberté religieuse, à l’obscurantisme ou à la pression du quartier de la Porte de Douais. Un professeur va peut-être se faire suspendre pour ses propos mais le prêcheur religieux qui tient les mêmes à quelques kilomètres de là est toujours en poste. Parlons-en d’ailleurs du quartier, de ces jeunes étudiantes qui parcourent la petite centaine de mètres qui séparent la faculté du métro la boule au ventre de peur de se faire agresser. Xavier « super-féministe » Vandendriesche compte t’il prendre des mesures ? faire une déclaration ? demander aux autorités compétentes que des sanctions soient prises ?  

J’ai retenu une phrase magnifique de cette vieille génération, celle des Taisne, Wallon-Leducq et VDD : le génie du Droit ne sort que si l’on prend la peine de frotter la lampe. L’adage c’est un truc de juriste. -MP

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