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Le Club des Insurgés

7 juin 2016

Le politiquement correct français avale des couleuvres ukrainiennes

La situation difficile de l'Ukraine brouille la communication extérieure du pays

Hier, nous apprenions qu’un français a été arrêté par les autorités ukrainiennes qui prétendent avoir empêché une série d’attentats terroristes prévus en France à l’occasion de l’Euro 2016. La mayonnaise est montée dans la presse mais surtout sur les réseaux sociaux où cette information (qui s’est révélée être un semi-canular) a permis de se rendre compte, comme s’il en fallait encore une preuve, que ces derniers sont parfois un vivier de jeunes démagogues. Ainsi, mes amis qui pensent correctement ont publié “On ne lui demande pas de quel origine il est lui xD Lol” ou encore “On attend que le FN, les quiches et la vaches se désolidarisent”, en référence à l’origine lorraine (finalement révélée) du présumé terroriste et à son appartenance à un mouvement d’extrême-droite dont la démonstration ne tient qu’à la découverte d’un t-shirt à son domicile français. Cette annonce a été raillée pour son absence de fondement sérieux et, s’il est pourtant confirmé qu’un français lorrain détenant un t-shirt d’un groupuscule extrême a bien été arrêté en  possession d’armes, la menace terroriste a été jugée peu crédible et donc écartée.

Cette information est inintéressante mais son traitement l’est. Il en dit long sur les différences profondes de perception des causes du terrorisme qui émaillent la société française. Il en dit long également sur ce que l’on veut voir à travers la violence politique et sur ce que l’on se refuse à analyser comme étant de la violence politique. Anders Breivik, psychopathe et extrémiste norvégien, a donné un espoir malsain à un certain nombre de personnes en Europe de voir émerger un terrorisme d’extrême droite concurrent au terrorisme islamique. Il n’en a rien été. A part quelques éléments groupusculaires de jeunes paumés et de vieux gâteux qui se réunissent pour fêter l’anniversaire d’Hitler, le fascisme à papi est mort et bien mort, en ce qu’il a d’influent sur l’Europe, en 1945.

Les nouveaux “fachos” n’ont rien à voir avec eux, ils sont, le plus généralement, les adhérents idiots et pauvres de la cause identitaire indigène. Ce sont des purs produits de notre société, pas du monde d’avant. Ils n’ont que trop bien compris le multicultularisme et demandent implicitement à ce que soit reconnue une communauté blanche comme il y a une communauté noire ou une communauté musulmane. Comme ces autres communautés, qu’ils singent, ils se posent en victimes, demandent réparations et créneaux médiatiques pour affirmer leur droit à “être”. Ils refusent de subir, comme les autres, un empiétement communautaire et avancent leur statut d’indigène européen pour se justifier comme d’autres mettent en avant leur statut d’indigène africain pour justifier leur présence au nom de la réparation de la colonisation. Venez me dire après ça que la société multiculturelle n’est pas l’obsession de la race.

Mais leurs moyens sont dérisoires, leurs organisations internes décousues et l’adhésion de la communauté blanche, sur laquelle ils n’exercent aucune influence réelle, est inexistante. Leur propos reste donc au stade de la revendication communautaire et se trouve bien incapable de devenir politique. Cette absence de propos politique justifie qu’il n’y ait pas d’organisation terroriste sérieuse à l’extrême droite puisque le terrorisme est un outil politique et non une politique à part entière, il faut un moteur idéologique bien organisé et financé or celui-ci n’existe pas. Et vous me voyez arriver gros comme un troupeau de bisons au galop: il n’en va pas de même concernant l’Islam politique. Comme a déjà été évoquée dans le Club la question de la différence entre Islam religieux et Islam politique et des circonstances sociétales et géo-stratégiques qui permettent l’émergence de ce dernier au sein des sociétés occidentales, j’en profite pour passer directement à l’étape suivante: pourquoi l’Ukraine et pourquoi l’extrême droite.

Comme cette information s’est dégonflée et que l’on n’en connaît même pas la source, la suite de cet article est à la fois un avis et un pronostic. Je déteste verser dans la prise de position absolutiste alors allons-y franchement: il est absurde d’évoquer le complot médiatique ou toute autre sornette. Il est fort probable que cette personne existe et qu’elle ait bien été attrapée en possession d’armes et d’explosifs. Mais c’est la situation qui n’existe pas.

L’Ukraine est un pays en guerre qui sert de terrain de jeu aux américains et aux russes, par le truchement de l’Union Européenne pour les premiers. Outre les étudiants de Kiev, on a réalisé récemment que les pro-européens sollicités pour la révolution n’étaient pas toujours les progressites que l’on aurait souhaité. Certains jeunes européens en déshérence (rares) se sont enrôlés pour rejoindre les combattants “pro-ouest” et, le moins que l’on puisse dire, c’est que leur psychologie pourtant déjà fragile a été mise à rude épreuve. Il faut dire que le conflit consistant pour l’essentiel en un affrontement entre mercenaires russes et néo-nazis ukrainiens, tous déchirés à l’alcool de patate artisanal du matin au soir et disposant gratuitement d’armes sophistiquées à volonté, il n’est nul besoin d’invoquer les meilleurs psychologues pour estimer qu’une telle situation nuit à l’éveil normal d’un adolescent. Je me fais donc l’avocat des personnes que je critique, dans une certaine mesure, puisque le fait de voir l’Ukraine comme une Syrie d’extrême droite n’est pas un propos incohérent. C’est même assez intéressant. Et si vous êtes vous-même une de ces personnes qui pensent que l’extrême droite est la seule menace sérieuse qui pèse sur l’occident aujourd’hui, je vous offre ce début d’argument, cadeau de la maison, mais sachez qu’il est extrêmement maigre.

Car si l’Ukraine peut être vue comme une Syrie d’extrême droite, c’est une Syrie du pauvre. En comparaison, l’Islam politique en Syrie c’est un conflit immense qui s’étend sur tout un sous-continent, qui tombe des Etats post-coloniaux, dispose de relais idéologiques, techniques et financiers partout en occident, qui s’ingère dans des problématiques, parfois séculaires, de politique locale (Palestine), qui s’inscrit dans des schémas géo-stratégiques modernes (Russie, Chine, Inde) et qui fait tout ça sur un sol contenant une bonne partie des réserves d’hydrocarbures du globe. L’Ukraine, c’est un agglomérat de groupuscules que même l’extrême droite officielle conspue, qui n’a retourné qu’un Etat tutélaire sans vraiment réussir à s’imposer derrière, qui s’inscrit dans un affrontement géo-stratégique éculé (USA contre Russie) et qui n’a pas les moyens de profiter de l’argent qu’on lui confie pour s’exporter, ne serait-ce que dans un pays voisin.

Mais ces deux derniers paragraphes, c’est juste pour le sport. En réalité, ce français, dont on rappelle qu’il était inséminateur (c’est comme la PMA mais avec des vaches) et qu’il gagnait mal sa vie, a sûrement succombé aux cyrènes habituelles des pays en guerre en matière de marché noir et de réseaux mafieux. Le trafic d’armes y est (sans doute) très lucratif  et le fisc peu regardant. C’est ce qui semble le plus probable. Certains ont Mahomet comme prophète, d’autres Nicolas Cage. MP

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1 juin 2016

Karim Benzema: mais pourquoi est-il si méchant ?

Karim Benzema, attaquant du Real Madrid

Nous sommes en 2007. Je suis installé dans ma cuisine, à Calais, j’ai à peine 17 ans et ce soir l’équipe de France de football rencontre l’Autriche, futur pays hôte de l’Euro. L’année précédente, j’ai vibré avec ma famille, tous agglutinés sur la télé du salon, devant les derniers coups de génie de Zidane à la coupe du monde et pleuré devant l’injuste défaite des Bleus en finale. Le numéro 10 de mon enfance, héros de 98, n’est plus là et Thierry Henry est sur le départ. Ça sent la fin d’une époque. L’équipe nationale saura t’elle se renouveler ? Les journalistes sportifs sont réservés mais je veux y croire: les nouveaux Bleus seront au moins aussi forts que leurs prédécesseurs, j’en suis persuadé. J’ai hâte de voir les nouvelles têtes, la relève. Le match commence. Samir Nasri court partout, il dribble, je me régale, une retournée acrobatique ! Dommage, ça passe à côté. Mais, seigneur, quel joueur. Il est maintenant en bas à droite de mon écran, le score est toujours vierge mais tout ça est fort prometteur, il centre à raz-de-terre, Benzema la reprend, eeeeeeeeet but ! Première sélection et premier but ! Comme Zizou ! Je saute de joie, à nous l’Euro 2008 !

Nous sommes en 2016. L’équipe de France nous a fait cauchemarder jusqu’en 2014 où on a enfin eu droit à un quart de finale de coupe du monde. Bon niveau global mais rien de transcendantal non plus. Même quand on n’a pas le bagage technique pour pouvoir parler football sérieusement, on sait qu’aligner dans une même phrase les mots “équipe de France” et “Anelka” ou “Ribery”, “Domenech”, “Nasri”, “Evra”, “Afrique du Sud” inspire à tous les français le mauvais jeu, le dégoût, la honte. Quand on repense à cette période, on repense aux clashs, aux insultes, à la culture racaille-riche avec ses joueurs inefficaces au possible, surpayés, qui snobaient des fans qu’ils ne méritaient pas, un casque vissé sur les oreilles. Les quelques améliorations de comportement auxquelles on eut droit fleuraient bon l’intervention de communiquants à des kilomètres à la ronde. Parfois même, les clubs des joueurs faisaient la police de peur que les saillies des Bleus ne se répercutent sur leur image (comme en 2010, où seul Chelsea avait réussi à faire taire Anelka).

Pourtant, le plus éprouvant pour un supporter, ce n’est même pas ce constat accablant. C’est le fait qu’à chaque embellie, toujours de courte durée, on y a cru. On a cru à la sortie de crise. On s’est investis. On s’est forcés même. On s’est émerveillés devant ce que les “joueurs des plus grands clubs européens” voulaient bien nous jeter à ronger. Un passement de jambe, un une/deux réussi et nous n’étions que louanges et tendresses. Les journalistes sportifs rouspétaient, nous traitaient de naïfs. Depuis qu’ils s’étaient plantés en 98, on ne les prenait plus toujours très au sérieux. On attendait les buts de Benzema. On les attendait comme les personnages de Samuel Beckett attendaient Godot.

Et puis on s’est lassés. On en a eu marre de leur frasques, de leur thune, de leurs Zahia et de leurs Ferrari. On a calqué nos réalités sociales sur cette équipe et on l’a divisée en deux, comme notre société est divisée en deux. D’un côté les joueurs qui n’ont qu’une religion, l’argent, et qui n’ont ni port ni patrie. Et de l’autre, les petits gars, travailleurs, naturellement sympathiques, qui ne font pas de vague et qui se donnent. On s’est alors enthousiasmés pour ces derniers. Les Griezmann, Gignac, Payet, Cabaye, Coman… on excuse une maladresse de Rami en défense et Payet nous offre la victoire d’un sublime coup-franc direct. C’est un peu brouillon mais on en redemande.

En faisant cela, nous avons manqué de respect à la féodalité du football, du business-football plutôt. Les égos surdimensionnés de nos seigneurs fainéants sont meurtris, blessés. Et ces grands adolescents égoïstes ne supportent pas l’idée même d’une remise en cause de leur présence sur le terrain. Ils piquent leur crise, pleurnichent, ce n’est jamais de leur faute, ce sont eux les victimes. Karim Benzema, encouragé par Eric Cantonna, s’est alors souvenu qu’il avait une couleur de peau et une religion, un pays d'origine et un quartier dans lequel il a grandi. Une communauté. Relayée par Jamel Debbouze, la complainte de Benzema montre qu'il n'a eu qu'un pas à franchir entre la scène de la mondialisation ultra-libérale section sport et celle de l'idéologie libertaire multi-culturelle. Alors que ce sont principalement des raisons d'ordre moral et sportif qui ont justifié son éviction de la liste des vingt-trois joueurs retenus pour l'Euro 2016, il explique que ce choix est la conséquence d'une pression raciste. Mais, dans une France qui n'en peut plus d'être traitée de raciste pour un oui ou pour un non et qui commence à le faire savoir, l'idéologie libertaire a appris à se faire méfiante. Elle a affiné son discours, son image, ses recours, ses parades et nous nous sommes habitués à un duel au fleuret avec elle. En sortant sa grosse excalibure anti-raciste du fourreau des années 80, l'ami Karim a révélé qu'il était un peu rouillé pour cet exercice. Sa carte "joker" d'amateur choque les joueurs expérimentés de sa propre équipe qui n'ont pas envie de voir leurs années d'entrainement et d'approche stratégique anéanties par la seule action d'un bourrin. Alors, son propre camp le dénonce, le marginalise, fustige des propos malheureux et assure que l'équipe de France est assez multicolore pour ne pas être invalidée (ce qui est complètement raciste, la France n'est pas un laboratoire de dosage de mélanine mais une patrie culturelle et politique). Les nostalgiques de la vieille France ont tort de dire que la nouvelle aristocratie ne se soucie pas de sa pureté. MP   

31 mai 2016

Sur la droitisation

Robert Ménard tente une réunion des conservateurs à Droite

La “droitisation” du peuple est une inexactitude. Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine, existait la France politique. A cette époque, deux grandes tendances politiques se dégageaient: la gauche et la droite.

La droite, c’était un père, un chef de famille, un salaud, qui rappelait doctement au peuple sa filiation, son hérédité, son appartenance à une terre sur laquelle sont enterrés ses ancêtres, les devoirs qui pèsent sur lui du seul fait de sa naissance et auxquels il n’a nullement consenti. Le peuple était à ses yeux un chaînon responsable mais sa responsabilité était de s’inscrire dans la cohérence de la lignée.

La gauche, c’était une mère. Une mère aimante jusqu’à l’asservissement, à l’écoute du peuple, de sa raison comme de ses caprices. Pour elle, son petit protégé était fantastique et hautement responsable, responsable de lui-même. Elle insistait pour qu’il prenne soin de lui, qu’il soigne cette vilaine maladie de la pauvreté et qu’il s’augmente intellectuellement par le partage égalitaire des savoirs dont l’objectif était l’émergence de tous les talents disponibles, nonobstant leur condition sociale.

Mais la gauche était aussi une mère protectrice, jusqu’à l’hystérie. Elle ne tolérait aucun écart interne et n’hésitait pas à confisquer la nationalité. Elle s’insurgeait contre ces patrons qui tentaient de faire appelle à des peuples pauvres pour mettre en concurrence ouvriers français et ouvriers étrangers afin d’en tirer le meilleur parti financier. Elle était contre l’immigration, se servait de la Nation pour justifier la solidarité et les frontières lui semblaient être une protection contre la fuite des richesses françaises et l’incursion d’idéologies politiques rétrogrades venues de l’extérieur.

La politique, c’était un consensus entre les deux, souvent obtenu au terme d’un affrontement grandiose et virulent. C’était des révolutions ou des unions sacrées. Parfois, des grands Hommes constituaient un pont, une synthèse entre ces deux tendances. C’était autre chose.

Aujourd’hui, la gauche a quitté son rôle pour voguer vers de nouveaux horizons. En adoptant l’idéologie libertaire, idéologie de salon intellectuelle et bourgeoise, elle s’intéresse désormais à l’Homme mais plus au peuple. Ou seulement à l’occasion de quelques spasmes émanant du cadavre socialiste. La droite, elle, y a vu une opportunité magnifique: elle a enfin pu se défaire de son rôle ingrat et a revêtu celui de la mère aimante et protectrice. Marine Le Pen n’a pas “dédiabolisé” son parti, elle n’a pas réussi à en faire un parti “ni gauche, ni droite”. Marine Le Pen est de gauche, son programme est chevènementiste et ses références à l’immigration ou à la frontière ne sont plus dictées prioritairement par des convictions identitaires mais par la protection des ouvriers français, des savoirs français, des richesses françaises. Elle applique Marx et Engels.

Alors, bien sûr, la demande identitaire est extrêmement forte aujourd’hui de la part du peuple. Mais cette demande se fond d’avantage dans une demande de retour du politique, droite comme gauche. L’offre à droite oscille et s’étire entre un reniement complet au profit d’une approche du peuple d’ordinaire réservée à la gauche (et qui fonctionne très bien) et un raidissement de la position de droite traditionnelle (parfois grotesque, mais tout aussi efficace). La première droite est donc une gauche qui n’est pas à sa place, si Mélenchon “remasterisait” le programme de Georges Marchais, il ferait au moins 20% et Marine Le Pen serait éjectée par les membres de son parti qui revendiquent une vraie position de droite (et je sais que ça devient assez complexe). En bonus, on peut même estimer que la demande identitaire, en elle-même, contient une demande gauche/droite à travers la volonté de revenir, certes à une certaine idée d’hérédité et de filiation, mais aussi d'un retour de la laïcité et de l’école républicaine ancien modèle, deux piliers de la gauche.

Le peuple ne se “droitise” donc pas, il se “repolitise” plutôt. Le Bloc Identitaire l’a bien compris, lui qui revendique sans cesse désormais des manifestations et des évènements #identitaires&patriotes. MP

26 mai 2016

De mai 1968 à mai 2016

Manifestation étudiante en mai 1968

La CGT est dans son rôle. Elle défend les salariés syndicalisés, c’est à dire essentiellement ceux qui disposent d’un contrat de travail à durée indéterminée. La loi Travail consiste effectivement à affaiblir leur statut pour permettre de décongestionner par le bas: emplois flexibles et précaires plus accessibles, mieux payés, moins de chômeurs. Évidemment, la conséquence première est une précarisation des travailleurs peu ou pas qualifiés. Les autres ne sont pas concernés car, pour eux, faire carrière implique la mobilité professionnelle, dans la hiérarchie de l’entreprise ou d’une entreprise à une autre.

Le peuple semble s’en plaindre aussi mais sans partager le propos politique des syndicats, toujours porté très à gauche. En effet, la loi Travail est vue par lui comme une nouvelle injonction ultra-libérale de l’Union Européenne. La gauche la perçoit de la même manière, mais là où ils divergent, et c’est là que ça devient intéressant, c’est que le peuple inscrit sa position dans une analyse patriote: l’UE n’est pas qu’un échec social pour lui, c’est un échec global qui appelle une reprise en main de l’économie, du social, de l’éducation, de la diplomatie par les patries européennes.

L’alliance Nuit Debout/ syndicats (comprendre extrême gauche/ CGT-FO) aime à dire qu’ils ont des intérêts communs avec le peuple. Ils en ont quelques uns c’est sûr. Mais ils oublient de préciser l’océan de divergences qui les éloigne. Leurs jeunes militants en ont des étoiles plein les yeux, ils croient en un nouveau mai 68. Ce n’est pas un nouveau mai 68. Mais il y a quand même une ressemblance: en 68, les étudiants croyaient aussi se trouver au centre d’un grand mouvement populaire. Ils avaient juste oublié que l’immense mobilisation sociale avait refusé à se joindre à leurs revendications politiques ultra-progressistes. Ils croyaient être suivis, qu’ils allaient triompher aux élections. En juin 68, ils eurent l’UDR et, en mai 69, ils eurent Pompidou. Les rêveurs de mai 2016 croient au Grand Soir, ils auront Marine Le Pen au second tour en 2017. MP

4 mai 2016

Jeu migratoire

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La Croix-Rouge et certains professeurs proposent une immersion consistant à placer une classe de lycéens dans la peau des migrants. Ce jeu de rôles a été imaginé et essayé en Norvège ou dans un quelconque pays nordique, on ne sait jamais, pourvu que l’on puisse invoquer le désormais mythique “modèle scandinave”. C’est un modèle que l’on aime beaucoup, si bienveillant, si maternel. En somme: un modèle en rupture totale avec nos habitudes de sociétés latines incorrigiblement fondées sur l’autorité du père et de son oeil inquisiteur porté sur l’étranger qui vient demander la main de sa fille.

Le jeu consiste donc à faire entrer les lycéens dans une sorte de délire empathique en les regroupant par cinq pour qu’ils s’imaginent avoir la responsabilité de leur propre famille dans un environnement hostile, fuyant la guerre avec peu de nourriture (mais que fait Françoise Dolto ?). Ce qui n’est pas très réaliste puisque les réfugiés de guerre font ce que la plupart des réfugiés de guerre font depuis que la guerre existe: ils restent le plus à proximité de chez eux (Turquie, Liban, Jordanie, etc..), seuls les jeunes hommes vont tenter leur chance plus loin afin de trouver du travail, même si la télévision focalise toujours sur les familles qui viennent malgré tout. Sans compter que la majorité des migrants ne sont pas des réfugiés. Pour que ce soit vraiment réaliste, il faudrait laisser plusieurs élèves évoluer en loups solitaires, confisquer l’aide alimentaire pour monter un marché noir, organiser une filière de cambriolage en exploitant les enfants et une filière de prostitution en exploitant les femmes. Mais les adolescents (vous savez ce que c’est) risquent de répondre que c’était “trop cooooool”, ce qui est assez éloigné de l’objectif pédagogique initial. Bref, les sales gosses occidentaux doivent rester des heures à marcher dans le froid puis atteindre une frontière symbolique qu’un intermittent du spectacle revêtu d’une tenue de l’armée démilitarisée (ce qui le fera vraisemblablement ressembler à un punk-à-chien) leur interdira de franchir. Les petits démons capitalistes, réalisant qu’ils ne pourront pas recharger leur Iphone pour finir leur niveau sur Candy Crush, s’identifieront alors aux migrants et pleureront de rage lorsqu’il réaliseront qu’en dépit de ce que leur ont appris les libertaires depuis toujours, lorsque le monsieur a dit non, c’est non. Horrible.

Rien n’a franchement changé depuis mai 68, la lutte contre l‘autorité bat toujours son plein: la frontière c’est le clivage, le rejet évident de l’Autre, la discrimination et donc - par un pont de singe intellectuel un peu malhonnête - le racisme. Le problème, c’est que cette rébellion adolescente n’est plus l’affaire d’étudiants révoltés du carrefour de l’Odéon mais bien celle de l’éducation nationale. Finie la contestation de la rue et bonjour l’autorité de l’instruction publique. Mais ne leur dite surtout pas qu’ils tiennent l’idéologie dominante: ça les fait convulser. Et ça fait des années. On peut remarquer que la longévité de leurs idées dans le débat public français a maintenant pris la forme d’un conservatisme assez particulier puisqu’il se fonde sur la perpétuation inconditionnelle et sans aucun recul possible d’un progressisme vengeur et destructeur dont la finalité absolue est la glorification d’un “moi, unité sociale indispensable”: apogée du consentement individuel pour certains, égoïsme individualiste et logique consumériste pour les autres.

C’est une idéologie qui peut, en fonction de l’humeur, s’avérer intellectuellement tantôt irritante ou tantôt récréative mais c’est une idéologie quand même et elle mérite qu’on la traite comme telle. Aussi, cette grossière opération de propagande n’est qu’un outil et ne peut être comprise comme un argument “anti-nombriliste” qu’à grand renfort d’interventions de journalistes lettrés et cultivés (genre une Léa Salamé ou un Yann Moix) et de philosophes reconnus par leurs pairs (insérez ici un BHL aléatoire). Avec le même exercice, mais organisé par le gouvernement de Damas dans les lycées syriens, Bachar Al-Assad convaincrait les siens, qu’au contraire, il ne faut pas aller en Europe mais rester pour la survie du pays et pour bâtir la Syrie de demain. La même démonstration donc mais au service du nationalisme. Les libertaires en feraient des cauchemars.

Moi, en revanche, je propose qu’on aille plus loin dans l’exercice. Il faut montrer jusqu’au bout ce que sera la vie pour les migrants s’ils passent la frontière, puisque certains y arrivent. Je propose donc qu’après des mois passés à attendre dans la boue, dès que ces petits obèses égoïstes seront mûrs, on leur ouvre la frontière avec de grands sourires béats et une chaleureuse cérémonie de bienvenue. On leur annoncera alors qu’ils auront bien du boulot et on les fera travailler à la chaîne dans une usine Volkswaggen, cinquante heures par semaine pour 400 € par mois. D’autres intermittents seront embauchés pour jouer des allemands touchant trois fois plus et organisant un pot pour leur départ à la retraite. Avec des pensions que ces petits salauds de mini-bourgeois, dans leur rôle comme dans leur vie, ne pourront jamais espérer obtenir en fin de carrière. D’autres intermittents encore seront embauchés pour jouer une manifestation d’allemands chômeurs, beaucoup trop chers pour être embauchés, qui auront la rage contre eux, qui refuseront la religion du Vivre Ensemble et les discrimineront. Alors, un libertaire plein aux as dira à ces mangeurs de BigMac qu’ils peuvent faire venir leurs enfants mais, attention, “pas de travail Momo, ou payé moins cher encore”. Et puis on leur distribuera Le Capital, l’ouvrage de Karl Marx, en leur expliquant ce que le vieux entendait par immigration comme “armée de réserve du Grand Capital”. Et il comprendront alors que les libertaires sont le collaborateur le plus discret mais le plus efficace des libéraux. On essaye ? MP

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3 mai 2016

Chiites contre Sunnites: une nouvelle façon de voir le Moyen Orient

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La situation civile à Alep est désastreuse mais les commentaires dénonçant l’islamophobie rampante des occidentaux sur ce malheur ne le sont guère moins. En effet, Alep n’est pas n’importe quelle ville syrienne, elle est “l’autre Syrie”, celle vers laquelle se tournent tous les défenseurs d’un avenir différent pour cet Etat qui n’en est plus un. Alep est la grande cité commerçante du pays et a toujours joué un rôle de contrepoids politique face à la capitale administrative, Damas. Alep est sunnite et Damas est chiite. L’Islam géostratégique ne présente décidément aucune originalité.

La Syrie est un Etat à majorité sunnite (80%) dirigé par une dictature aux accents laïcs mais dont les cadres principaux sont alaouites (chiites donc). Vous saisissez alors le problème. La guerre froide que se livrent l’Iran et l’Arabie Saoudite ainsi que l’expérience iraqienne (qui fut la même que l’expérience syrienne actuelle mais avec un rapport de force inversé) nous ont appris que le capharnaüm du Moyen Orient devient lisible si l’on accepte de s’extraire de notre carcan intellectuel occidental de l’Etat-nation et que l’on ne raisonne plus en fonction des vieux Etats coloniaux dessinés à la règle mais en terme d’opposition Chiites contre Sunnites. Si l’on accepte, de surcroît, de comprendre l’Islam non plus seulement comme une religion mais comme un tout politique alors on saisit qu’en Syrie, ce qui s’affronte, ce n’est certainement pas la démocratie occidentale et le fanatisme religieux mais deux Islam politiques, au sein desquels on peut distinguer des nuances allant du fanatisme rigoriste à un Islam intellectuel rêvant des raffinements passés de Cordoue et de Bagdad.

Les anticolonialistes devraient faire attention. Leur croyance occidentalo-centrée que l’Etat laïc et la séparation du temporel et du spirituel sont le summum du développement civilisationnel les confond avec les colonisateurs du XIXe siècle qui ont précisément créé les Etats que l’on souhaite maintenir aujourd’hui pour cette raison. L’Islam édicte déjà des règles temporelles, nul besoin de les concurrencer avec une production juridique parallèle: on peut gérer tout un pays avec le Coran, c’est impossible avec le nouveau testament.  Si j’étais Michel Onfray, je vous ferais remarquer que la politique sociale occidentale peut rougir de honte face à la politique sociale d’un Etat dirigé par les Frères musulmans ou au succès de Barraka. Mais je ne suis pas Onfray même si mon chauvinisme occidental ne m’empêche pas de plaider pour la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes, même quand il choisissent autre chose qu’un mode de vie occidental.  

Mais cette faiblesse du public occidental est exploitée. Ceux qui veulent nous faire raisonner selon notre grille de lecture typique “victimes et terroristes”,  “Etat totalitaire contre rébellion”, ”opposition modérée contre islamistes radicaux “, savent, via Facebook et Twitter, faire de la situation critique d’Alep et du retrait occidental une manipulation honteuse. En disant que nous sommes islamophobes et nombrilistes, ils cherchent à profiter de notre mode actuelle de l’autoflagellation pour nous pousser à intervenir. Mais à intervenir pour quoi ? pour qui ? Les chiites bombardent la ville pour la reprendre et les sunnites sont en débâcle. C’est donc la fin. La confusion maintenue autour de EIIL, Front Al-Nosra et modérés n’est pas involontaire. On voit fleurir dans la presse de Gauche et sur les réseaux sociaux des articles sur les victimes de guerre d’Alep dont on estime qu’elles sont “oubliées” pour les européens mais, pensez-y, entendez vous parler des victimes chiites yémenites bombardées par leur propre gouvernement sunnite ? Indignation sélective disiez-vous ! MP

2 mai 2016

Et ils brûlèrent la Porsche

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L’incendie de véhicule est un symbole de la contestation d’aujourd’hui, en banlieue comme dans les centres-villes. Il est représentatif de notre époque, à la fois de notre fascination matérielle et de notre lâcheté. La loi de 1957 sur l’obligation d’assurance nous a propulsé dans cette voie en préservant nos rebellions infantiles de consommateurs occidentaux de toute éventualité de poursuites coûteuses en argent public et en courage institutionnel. Notre société ayant érigé la subversion comme autorité intellectuelle dominante, il n’apparaît pas surprenant de voir ses défenseurs développer des arguments bienveillants pour expliquer la voiture brûlée comme une mère disculpe son fils d’avoir participé à une transgression rituelle, certes réelle, mais sans gravité.

En brûlant la Porsche d’un simple électricien fanatique de belles carrosseries, les libertaires ont révélé la contradiction qui les décimera tous. Peut-on éternellement mettre le moi revendicateur au centre de tout et faire une impasse pour les voitures de sport ? la réussite économique et sociale ? Issus en ligne directe des prêtres de la société du plaisir sans empêchement, de la jouissance et de la jeunesse éternelle, ils entretiennent malgré eux le diktat d’une société fondée sur le caprice, la consommation effrénée et insatiable, officiellement de droits et libertés mais toujours, à terme, de biens et de prestations. Ne pourrons-nous pas louer nos ventres bientôt ? A quand le progrès, pour un homme, de pouvoir disposer d’un utérus fonctionnel et de se louer sur ebay ? Qu’en ai je à foutre de tous ces orphelins qui meurent, je veux mon enfant à moi, c’est mon droit ! Il deviendra un accessoire intéressant pour mon couple, cette source intarissable de consommation à crédit, puis il deviendra un bon copain quand j’aurai décidé qu’il ne doit pas devenir un frein à mon épanouissement personnel.

S’il y a bien une chose que les libertaires nous ont apprise, c’est que l’on peut faire ce que l’on veut de notre corps, de notre fric, de notre vie et même de notre mort. Alors une Porsche gagnée de dur labeur… c’est si peu ! La lutte des classes sied très mal à l’extrême gauche désormais. Elle est plus crédible dans son rôle d’institution morale jurant combattre le formatage de la société auquel elle participe pourtant activement. Un grand auteur du XIXe siècle accusait la religion de tenir ce rôle à l’époque. Il s’appelait Marx et parlait d’opium du peuple. C’est toujours bon de revoir ses classiques. MP      

28 avril 2016

Salah Abdeslam, le cendrier vide

Maître Mary est l'avocat belge de Salah Abdeslam

Salah Abdeslam “a l’intelligence d’un cendrier vide”, c’est un “petit con d’une abyssale vacuité”. Maître Mary semble avoir une conception originale de la déontologie de l’avocat. Le Réglement Intérieur National, qui réglemente la profession, parle pourtant d’un exercice des fonctions de l’avocat dans “la dignité, la conscience” et dans le respect des principes “de délicatesse, de modération et de courtoisie”. Tous ces trucs… Les rageux me diront qu’il est soumis à la déontologie belge, mais c’est peine perdue: les mêmes obligations pèsent sur l’avocat belge (elles sont même pire ; article 1.2 du Code de déontologie de l’avocat). Ce n’est pas comme si l’on faisait reposer toute la ligne de défense de l’accusé sur un affrontement symbolique entre Etat de Droit et barbarie terroriste...

Mais trêve de juridique. Il n’y aura pas de délices en la matière au cours de ce procès. Non, ce qui est intéressant, comme d’habitude, c’est la communication de la défense. Là, on se régale ! C’est un débile qui n’a pas lu le Coran apprend-on dans Libération. Ouf ! Rien à voir avec l’Islam donc. En France, la mécanique médiatique est rodée comme une vieille kalachnikov. D’ailleurs, c’est Maître Berton qui s’y colle, le lillois, un habitué des affaires médiatiques qui a toujours le bon mot et la bonne phrase pour le bandeau BFMTV. Il faut dire qu’il a été révélé par l’affaire d’Outreau, affaire dans laquelle les médias et les politiques furent juges. Et partie.

Gilles Keppel nous a appris qu’au contraire, il n’y a rien de réjouissant à apprendre que les combattants islamiques sont de plus en plus demeurés. C’est la fin du Jihad de deuxième génération, celui d’al-Qaïda, où les groupes occidentaux étaient des cellules isolées se composant de jeunes fanatisés qui cherchaient à frapper le symbole, à faire réfléchir. Abdeslam, Merah, Coulibaly sont des troufions, des soldats, des abrutis envoyés au front  parce qu'incapables de servir à autre chose qu’à se battre sur le terrain. Ils révèlent l’existence d’un état major, situé, lui, en zone sûre. Mais aussi d’une logistique et de lignes de ravitaillement, situées, elles, à proximité du front: dans les Moolenbeck de toute l’Europe. Ils révèlent  que leur bases arrières sont de plus en plus solides et organisées car abritées, financées et armées par les salafistes et les frères musulmans (de manière plus ou moins subtile). Ces derniers prennent de plus en plus d’importance dans un Moyen-Orient où les vieilles frontières coloniales explosent (printemps arabes) et où l’Islam redevient plus une politique globale qu’une religion commune.

Ce propos vous apparaît comme stigmatisant ? Alors demandez vous si ce n’est pas vous qui condamnez nos compatriotes musulmans. Oui, vous ! En effet, la société multiculturelle, grâce à laquelle on n’a plus besoin de se déposséder de sa culture d’origine, a remplacé la vieille identité française accessible par voie d’adhésion et basée sur le culte du commun  par une pluralité d’identités communautaires accessibles par voie de naissance et basée sur le culte de la différence. Dès lors, il ne faut pas s’étonner de voir certains français musulmans habitant dans des quartiers précaires se tourner vers les ressorts fraternels et sociaux proposés par leur “communauté” (puisqu’il semble falloir s’exprimer ainsi désormais). Le social est l’autoroute qui mène au politique et la fraternité définit l’appartenance sentimentale. Ainsi, lorsqu’un habitant d’Argenteuil déclare, face caméra, qu’il se sent plus fraternel d’un palestinien que d’un lorrain et que c’est pour cette raison qu’il préfère donner à Barraka qu’à d’autres, on repense à l’adage “une nation meurt quand sa fraternité nationale s’éteint”. Tout aussi préoccupant, certains blancs de la France profonde font de même par mimétisme et frustration. Le succès du Bloc Identitaire, qui rend coup pour coup à la montée de l’Islam politique en proposant actions sociales et ré-enracinement culturel, illustre le tragique de notre époque: finies les sociétés bâties sur des valeurs culturelles et politiques et rebonjour à celles fondées sur la race ou la religion. Samuel P Huntington avait prévu cette évolution et ses suites au début des années 90. On ne pourra pas dire que nous n’étions pas prévenus. MP

22 mars 2016

Un sentiment particulier pour nos amis belges

Satellite

Je ne connais pas de frontière plus absurde que celle qui sépare le nord de la France et la Belgique. Loin de moi la volonté de faire une éloge du “sans-frontiérisme”, bien au contraire, mais cette frontière là appartient moins au domaine de la démarcation qu’à celui de l’amputation.

Toutes les victimes du terrorisme sont dans mes pensées, partout dans le monde, n’en déplaise à la police de l’indignation qui croit voir dans l’émotion des peuples européens un rejet des peuples africains et orientaux, pourtant eux aussi durement touchés. Ces censeurs sont des imbéciles et prions Dieu que la Turquie, le Liban et le Mali préfèrent la pudeur et l’élégance d’un recueillement dans la dignité plutôt que l’indécence et la vulgarité des déclarations larmoyantes sur Facebook, accompagnées des dernières saillies en provenance d’agences de communication peu scrupuleuses.

Mais ce n’est pas trier les victimes que de se sentir encore plus touché lorsque le carnage atteint la communauté nationale, c’est à dire l’ensemble des individus qui ont décidé d’adhérer à une même identité: identité de valeurs, identité de projet, identité de culture. La somme des individus se choisissant une identité commune s’appelle un peuple. A travers le monde, il y a plusieurs peuples parce qu’il y a plusieurs valeurs, plusieurs projets, plusieurs cultures. Et c’est heureux, c’est sans doute cela la véritable diversité. C’est pourquoi la fraternité du peuple et la fraternité des peuples ne sont pas concurrentes, elles n’ont juste rien à voir.

Souvent, les malheurs que subissent les nations limitrophes nous inspirent un sentiment très proche du sentiment national car elles ont nécessairement participé au développement de notre propre projet national, soit qu’elles y furent alliées, soit qu’elles y furent opposées. Mais avec les attentats de Bruxelles, nous assistons à tout autre chose.

Car, bien que la Belgique et la France soient deux États distincts, j’ai le sentiment que ce qui s’est passé à Bruxelles s’est passé chez moi. Mes amis multi-cultularistes et euro-identitaires, pour des raisons différentes, me diront que je suis devenu européen convaincu. Non. Je n’arrive juste pas à identifier mes potes belges autrement que comme des français. Les valeurs attaquées sont des valeurs françaises, le projet attaqué est un projet français, la culture attaquée est une culture française. L’identité attaquée est l’identité française. Plus que le principe, mes potes belges parlent ma langue, ont les mêmes repères et la même sensibilité que moi. Ils ne sont pas autres mais semblables.

J’imagine que la proximité régionale influe beaucoup sur ma vision des choses. Il est vrai que nous, nordistes et belges, partageons accents, expressions, architectures, gastronomie, sociologies, cultures, géographie et, bien sûr, Histoire. Il est vrai aussi que picards, wallons et flamands se sont toujours joués des frontières administratives, départements, régions et autres brabants. Mais je n’arrive à extraire cela de mon esprit, pour moi cet attentat est le troisième à frapper notre nation. Je suis profondément meurtri car j’ai l’impression d’avoir perdu des concitoyens, et des concitoyens que j’apprécie tout particulièrement.

Je souhaite donc tout le courage nécessaire à mes amis belges, avec toute l’affection que vous savez désormais. -MP

 

9 février 2016

Pegida de retour à Calais

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On a tort de dire que son positionnement géographique peu attractif pour les vacanciers estivaux ne fait pas de Calais un de ces petits ports tranquilles propices au repos des familles et à la décontraction des écoliers. Venez, touristes, humer l’odeur alléchante du gaz lacrymogène, goûter aux délices de l’asphalte brûlant et vous émerveiller devant un spectacle pyrotechnique de pur artisanat local, le tout au son des balles en caoutchouc sifflant à travers l’atmosphère brumeuse de nos samedi après-midi. Chaque week-end, nos deux équipes d'intermittents extrémistes rivaliseront de talent pour vous confectionner un moment inoubliable: vos enfants adoreront leurs ateliers “fumigènes”, redemanderont l’initiation au lancer de parpaing, s’extasieront aux activités “chasse à l’Homme” et redécouvriront les joies des parades vichystes d’antan dans le plus pur esprit traditionnel des années 40.

Trêve de plaisanteries. Pegida manifestait à Calais ce week-end contre la présence de l’Islam en Europe aux côtés d’une association moins médiatisée: le Cercle des Patriotes. Les calaisiens ne se sont pas associés aux manifestants restant ainsi, encore et toujours, fidèles à leur politique de refus des extrêmes de tous poils et, surtout, de leurs idéologies.

Un peu de droit constitutionnel s’impose. Pegida est née en Allemagne et reflète une conception parfaitement germanique de l’identité nationale qui est une conception objective, c’est à dire critère par critère. La race, la religion, la couleur de peau sont autant de critères permettant de définir une nation au sens allemand du terme. La France fut la première nation, en 1789, à refuser ce mode de sélection tribal pour inventer sa conception de la nation, une conception subjective, où toute personne peut être citoyenne à condition d’adhérer à l’histoire, la culture, la philosophie, la sociologie, le projet national français. Investissement exigeant, certes, mais qui ne discrimine personne selon des critères de naissance. Ces deux conceptions de la nation n’ont eu de cesse de s’affronter pour l’hégémonie de leurs vues sur le continent européen. Napoléon d’un côté, Bismark de l’autre.

En soutenant Pegida, le Cercle des Patriotes accepte la désuétude de son nationalisme et la victoire totale des conceptions allemandes pour porter le réveil des peuples en Europe. En reléguant un peu vite les nations au rang d’identités historiques, le Bloc Identitaire avait déjà fait de même, avec plus de subtilité. Les soutiens du général Piquemal, arrêté par la police lors de la manifestation, prennent leur héros pour un Salan, ce général putschiste qui refusait l’abandon de l’Algérie par de Gaulle, alors qu’il n’est qu’un Pétain signant la capitulation de l’idéal français au profit d’une Europe allemande dans laquelle il quémandait une place.  

Ce reniement ne peut être accepté par un peuple français en pleine réaffirmation de ses principes et tentant d’arracher aux apprentis-sorciers du multi-cultularisme le contrôle d’une société dangereusement racialisée qui peut basculer à tout moment de l’utopie bien-pensante au racisme le plus violent. C’est la raison pour laquelle les associatifs calaisiens ont refusé avec hauteur de collaborer à cette manifestation qui, en l’absence de soutien populaire, s’est faite pitoyablement bastonnée par les forces de l’ordre. Le Cercle des Patriotes devrait méditer cette leçon, surtout s’il entend donner son nouveau nom au Front National. MP   

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